19 mars 1962 – fête de la Victoire : Le triomphe du peuple sur l’oppression coloniale
Le grand jour est arrivé. Après sept ans et demi de guerre et 132 années de colonisation française, la délégation du Gouvernement provisoire de la République algérienne et les représentants du gouvernement français signe enfin les accords d’Evian.
Le glas du colonialisme a sonné le 19 mars 1962. La signature des accords d’Evian fut l’aboutissement de pourparlers puis d’âpres négociations. Après le Caire en avril 1956, des réunions secrètes sont tenues à Belgrade le 25 juillet de la même année suivies par les «Pourparlers de Melun» (25-29 juin 1960) et puis les négociations de Lucerne en Suisse, février 1961 qui ont abouti à la reconnaissance par de Gaulle du droit des Algériens à l’établissement de leur Etat, et ce, avant le début du premier round des négociations d’Evian, le 20 mai 1961, retardé en raison du rejet par le FLN de l’association d’autres parties aux négociations. Il y a eu, également, les pourparlers de Lugrin en juillet 1961. Ces derniers furent suspendus en raison de la tentative française d’exclure le Sahara algérien des négociations, en le séparant du territoire algérien, et ce, avant les réunions de Bâle et Les Rousses tenues en octobre de la même année, puis ceux de février 1962. Le 19 mars 1962 marqua l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, conformément à l’article premier du document de 93 pages qui scellait ces accords de paix. L’heure tant attendue a sonné. Le peuple algérien disposa de son destin. Une perspective s’ouvrit sur l’avènement d’une Algérie libre et Indépendante. Les accords d’Évian ont ouvert la voie à la libération des prisonniers et la rentrée des réfugiés du Maroc puis de Tunisie. Un des membres de la délégation algérienne, Saâd Dahleb, a déclaré, en 1982, que les Accords d’Évian ont été «une grande réussite», voire «une œuvre extraordinaire», rien qu’en mettant fin à la guerre. Les accords constituent un couronnement et un aboutissement de la lutte armée. La France coloniale fut contrainte à s’asseoir à la table des négociations sans que l’intégrité territoriale et l’unité du peuple algérien ne soient remises en cause. La France avait adopté un stratagème de manière à diviser le territoire algérien pour préserver le Sahara avec toutes ses richesses souterraines, notamment après la découverte du pétrole en 1956. La délégation algérienne a su déjouer le plan malveillant de la France visant à porter atteinte à l’intégrité du territoire, à l’unité du peuple. Les Krim Belkacem, Saâd Dahleb, Réda Malek, Mohamed-Seddik Benyahia, Lakhdar Bentobal, Taïeb Boulahrouf, M’hamed Yazid et les autres négociateurs ont fait preuve d’habilité politique, de tact et de diplomatie en faisant progresser les négociations et les mener à leur terme dans le respect des principes de la Déclaration du 1er novembre 1954. Les tentatives de la partie française de vouloir semer le doute et la zizanie au sein de la délégation algérienne sont tombées à l’eau. «La paix des braves» proposée par Charles de Gaulle fut refusée par le signataire de ces accords, Krim Belkacem, qui avait qualifié celle-ci «d’appel à la reddition». Même les concessions lors des contacts informels entre des émissaires français et des membres du GPRA sur le maintien des bases navale de Mers El Kebir et aérienne de Bousfer (Oran) avaient un caractère à titre temporaire. Elles ont été récupérées, cinq ans après l`indépendance, au lieu de 15 ans comme souhaité par la partie française. Le ministère des Moudjahidine et des Ayants droit a réalisé, l’an dernier, un film-documentaire intitulé «Le négociateur algérien», pour immortaliser une date qui a refermé la longue parenthèse coloniale.
Amokrane H.
Commentaire : Jusqu’au bout des idéaux
Par Amirouche Lebbal L’Algérie célèbre, en ce 19 mars, la fête nationale de la Victoire, marquant le 61e anniversaire de l’entrée en vigueur du cessez-le-feu. Une fin des combats militaires proclamée la veille au terme de la signature des accords d’Evian par les représentants du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) et ceux du gouvernement français. Cet événement signe le début de la fin d’une longue nuit coloniale de 132 ans qui a abouti, moins de quatre mois plus tard, à l’indépendance de notre pays. Le cessez-le-feu négocié entre le GPRA, comme unique représentant du peuple algérien, et le gouvernement français, puissance colonisatrice, n’est pas une concession de la France coloniale et encore moins un choix stratégique de sa part. C’est le triomphe de la Révolution et de ses idéaux pour lesquels un million et demi de chouhada et des millions avant eux depuis 1830 ont sacrifié leur vie. Ces idéaux sous-tendant une indépendance totale et entière de notre pays et l’intégrité de son territoire, que le courant révolutionnaire du mouvement national a fait siens, constituent le but suprême du déclenchement de la Révolution. Ils ont été imposés par le GPRA comme des questions inaliénables sur la table des négociations, sans lesquelles aucun accord n’a de chance d’aboutir. La sacralité de ces deux objectifs, consacrés dans la proclamation du 1er novembre 1954 et la plateforme du congrès de la Soummam, n’a jamais été remise en question ou profanée par des concessions aussi insignifiantes soient-elles, de la part des chefs de la Révolution. Et ce n’est pas le fruit du hasard ou par excès de chauvinisme que dans l’Algérie indépendante, on a consacré la date du19 mars, fête nationale de la Victoire. L’histoire a, en effet, retenu que dès le début de la glorieuse Révolution, l’ennemi, sûr de sa puissance militaire, a promis en réponse à la proclamation du 1er Novembre, une guerre totale à quiconque contesterait sa présence en Algérie. Cette position d’apparence intransigeante s’était finalement peu à peu infléchie face à la détermination du FLN-ALN à mener le peuple algérien sur la voie de l’indépendance. Dans ses vaines tentatives à retourner la situation, la France coloniale change de fusil d’épaule et tente un nouveau stratagème, notamment avec l’arrivée du général de Gaulle au pouvoir qui s’est attaqué à la Révolution sur plusieurs fronts. Sur le plan économique, il a initié, dans l’espoir de gagner la sympathie des Algériens, des réformes socioéconomiques dans le cadre du plan de Constantine. Sur le plan militaire, il a entrepris de grandes opérations pour étouffer la Révolution et sur le plan politique, il a mis en œuvre une stratégie pour que le FLN ne soit pas l’unique porte-voix du peuple algérien et l’incontournable interlocuteur en cas de négociations. A ces manœuvres, s’ajouteront d’autres projets visant à morceler l’Algérie. Mais le génie de la Révolution a, encore une fois, triomphé dans les maquis, les villes et à l’international. Devant l’échec de sa stratégie, de Gaulle fut contraint de reconnaître le GPRA comme seul interlocuteur pour entreprendre les négociations consacrant le droit des Algériens à disposer de leur sort. Le référendum a tranché en faveur de l’indépendance pour que la souveraineté de l’Algérie s’étende sur l’ensemble de son territoire.
A. L.