LORSQUE LE TALENT ET LA GRÂCE SE CONJUGUENT, le résultat ne peut être qu’époustouflant. Ce fut le cas, dans la soirée de jeudi dernier, au théâtre national algérien Mahieddine-Bachtarzi où s’est produite la grande interprète de la chanson andalouse, Lila Borsali
Pour sa «Rentrée en Nouba», Borsali a subjugué le public, venu nombreux, avec un programme soigneusement sélectionné et admirablement interprété, avec le soutien d’un orchestre talentueux dirigé par la virtuose Leïla El Kebir. Pour introduire son programme, Borsali a choisi de déclamer un texte en français où il s’agit de «placer cette nouba, intitulée Wissal, sous le signe de ce qui fonde l’humanité : la rencontre entre deux êtres». La première partie de la soirée s’est déclinée en une Nouba dans le mode Raml Maya, entamée par l’orchestre avec une introduction musicale «Metchalia», suivie d’une «touchia». Ensuite la chanteuse a interprété le «Mçader» de la Nouba, avec le titre «Bitna fi hana». Les gammes se suivent et ne se ressemblent pas. Véritable bouquet musical, pour le bonheur d’un public, visiblement connaisseur et admirateur de l’artiste. «Houbi yazid koula yaoum», «Kam li fi sabile» ont été chantés dans le mode «Btayhi». Avant d’enchaîner le «Derdj» qu’elle met sous le signe de la séparation, Borsali déclame un second texte en français, où il est question, cette fois-ci, de la douleur de l’éloignement de «la cruauté de l’absence» et «la solitude de l’être». Pour ce «Derdj», elle chante «Billah ya Hamam», symbole du messager des amoureux qui se languissent l’un l’autre. Pour redonner «ses couleurs luxuriantes à la vie», quoi de mieux que «les retrouvailles et la rencontre des êtres aimants». «Ya achiqine», «Bayna dholo’i», sont les titres de «l’Insiraf» de cette Nouba suivis par «Lahabat chams al assa’il», «Haramtou bik nouâssi» et «Achiyatoun ka anaha ôkyane », en guise de Khlassate.
Pour la seconde partie de son spectacle, Lila Borsali a choisi d’inviter sur scène la chorale de la Société littéraire, artistique et musicale (Slam) de Tlemcen, une des plus anciennes associations artistiques de la capitale de Zianides, dont l’artiste est la marraine. Une association présidée par Toufik Benghabrit, auquel un hommage a été rendu par Borsali, à travers ce second volet de son programme. Pour rappel, Toufik Benghabrit est auteur-compositeur de musique andalouse, mais aussi enseignant universitaire de langues et de littérature. Avant d’inviter Benghabrit sur scène, Borsali a choisi d’interpréter un assortiment de chansons, écrites et composées par Benghabrit, accompagnée par les jeunes artistes de la Slam. Et comme la fête du Mawlid Ennabawi Echarif sera bientôt célébrée, Borsali a opté pour des Madih, tels que «Allah ya Moulana» et «Idha daka sadri».
Pour clore son show, Lila Borsali interprète, dans le mode Sihli, une valse intitulée «Tadawaltou fi bouldane», suivie d’une composition de chansons andalouses dont «Ahlan wa sahla bi mane zarana». A la fin de la soirée, Lila Borsali invite Toufik Benghabrit à la rejoindre sur scène. Avec beaucoup d’émotion, elle lui rend hommage en déclarant «que la vie a mis sur mon chemin cet homme qui a su, par ses mots, dire et raconter, ce que je portais en moi, à la fois comme tourmentes et comme espoirs». «Un peu comme un père qui sait lire, ce que dans son être profond, peut ressentir sa fille», a-t-elle confié à l’assistance. Un hommage en appelle un autre. C’est autour de Benghabrit et de la chorale de Slam de rendre la pareille à Borsali, avec une chanson qui lui est spécialement dédiée. Elle a été interprétée par la jeune Zoulikha Bensahla, membre de la Slam.
Hakim Metref