La steppe est un rempart contre l’avancée du sable

La sauvegarde et la promotion des espaces steppiques, véritable bastion du pastoralisme, sont des priorités nationales. A cet effet, une stratégie de lutte contre la désertification et d’adaptation aux changements climatiques a été élaborée. Pour Abdellah Hadoun, président d’Algerian Wildlife Watching Association, la préservation de la biodiversité est avant tout une affaire de civisme et d’implication du citoyen. «La ceinture verte demeure la seule alternative pour lutter contre l’avancée du désert», assène-t-il. «La réhabilitation du barrage vert regroupe un ensemble d’actions et d’interventions intégrées de conservation, de protection des ressources naturelles et de lutte contre la pauvreté et les disparités géographiques», ajoute notre interlocuteur. La nouveauté, relève-t-il, est la plantation d’espèces adaptées aux spécificités de chaque région, compte tenu de la nature du climat et du sol. Il cite, notamment, la casuarina, le platane, le pistachier de l’Atlas (el botma), le robinia pseudoacacia, variétés robustes qui revêtent une grande importance dans la lutte contre la désertification. La réussite du projet est l’affaire de tous (chercheurs, mouvement associatif, collectivités locales) invités à apporter leur contribution pour rentabiliser cet investissement. «Il ne suffit pas de mettre sous terre des plants. Le suivi et l’entretien doivent être assurés pour une période de trois ans au minimum», fait-il remarquer. La sensibilisation des citoyens pour la préservation et la protection des ressources naturelles doit se faire en collaboration avec le mouvement associatif et la population appelés à se joindre aux efforts des pouvoirs publics pour la restauration des espaces touchés par la désertification. La lutte contre la désertification est également une lutte contre la pauvreté et ne peut s’inscrire que dans le décloisonnement sectoriel pour permettre aux actions de l’Etat de bénéficier de la synergie et des complémentarités intersectorielles. Cela ne peut se concrétiser qu’à travers le renforcement des mécanismes nationaux de coordination intégrés dans les programmes nationaux de développement, à même d’assurer l’emploi rationnel de toutes les ressources financières disponibles. Les terres arides sont confrontées à de nombreux défis liés à la désertification, à la pression démographique, aux changements climatiques, à la surexploitation et à la mauvaise gestion des ressources. Il apparaît clairement que la poursuite de l’œuvre est indispensable pour prémunir des pans entiers du territoire national, encore très fragiles ou fragilisés, contre les méfaits de la désertification. «Le défi technique serait le maintien d’un couvert végétal pérenne, quelle qu’en soit la structure, sur les différents espaces contenus dans l’aire du barrage vert, chacun selon sa propre vocation», soutient Hadoun.
RECONSTITUTION URGENTE
Pour le président de l’association de protection et d’amélioration de l’environnement de Mecheria (Naâma), Ahmed Bendahou, la pression sur les différentes catégories de terres mises au pacage ne ferait que s’aggraver au point où le couvert végétal n’arriverait plus à assurer son rôle de protecteur des sols. Le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), confie-t-il, a financé le projet de l’association intitulé «Les sentinelles de la désertification». Celui-ci consiste en un protocole de suivi et d’évaluation de la désertification dans les wilayas de Tlemcen, Saïda, El Bayadh et Naâma. Le but du projet est de créer une synergie entre tous les intervenants. Chaque wilaya a bénéficié de deux ateliers sur la sensibilisation, le suivi et l’évaluation du projet assurés par des universitaires et experts. Après la validation du protocole qui contient tous les indicateurs liés à la problématique de la désertification et les formes de suivi, plus de 500 copies ont été distribuées aux institutions impliquées dans ce projet. «Ce document doit être un document de base pour toutes les conservations des forêts, puisqu’il tient compte des spécificités de chaque région», explique-t-il. Pour garantir une implication effective du mouvement associatif, Bendahou met l’accent sur la formation sur le phénomène de la désertification et les modalités de lutte contre ce phénomène. «Nous avons constaté une prise de conscience chez les citoyens, mais la stratégie de lutte contre la désertification peine à donner des résultats positifs», déplore-t-il. S’il est convaincu que le barrage vert est l’une des solutions pour lutter contre l’avancée du désert, il estime que l’urgence est de restaurer le couvert végétal de la steppe très sensible au processus de désertification aggravé par le surpâturage. Pour lui, «le désert n’avance pas, mais il se crée, car un couvert végétal ou une forêt qu’on ne restaure pas laisse place à la désertification». «Le barrage vert est une solution forestière dans un écosystème steppique où la forêt n’a pas de place», renchérit-il. La steppe algérienne est réputée pour sa flore et le plus grand défi pour l’Algérie, dans ces zones, est la reconstitution des parcours. «Sans cela, on continuera toujours à tourner en rond», met-il en garde. Une réunion récente avec le médiateur de la République a été l’occasion pour les associations de protection de l’environnement d’exposer le problème de la désertification qui, s’alarme-t-il, «est au pied du Djurdjura», avant de plaider pour le lancement urgent du programme de reconstitution de la steppe conformément aux instructions du président de la République. «Il faut des actions concrètes et commencer par la steppe en associant chercheurs, universitaires, population locale et mouvement associatif», recommande-t-il. Et de faire remarquer que ce dernier, dans ces régions, «n’est pas assez présent, d’où l’importance d’associer les populations locales». «C’est un phénomène très grave qui menace notre avenir», lâche-t-il. Pour lui, le dernier mot revient à ceux qui ont des ressources financières et le pouvoir de décision. «Autrement, on ne peut pas parler de développement du tourisme durable», conclut-il.
Samira B.