Gouvernement-walis : La performance conditionnée par le travail de terrain
Dans sa dernière réunion de coordination avec les walis, le Premier ministre a réitéré les instructions du président de la République qui a recommandé au nouveau gouvernement d’orienter ses efforts vers le travail sur le terrain. Aïmene Benabderrahmane a, ainsi, insisté sur le suivi permanent sur le terrain et la mise en place de mécanismes efficaces de contrôle, de veille et d’alerte précoce tout au long du mois sacré.
«C’est un discours politique rationnel loin de la langue de bois que les hauts fonctionnaires avaient l’habitude d’utiliser pour renouveler leurs promesses, alors que le citoyen continue à se plaindre de la bureaucratie administrative et autres», indique Yahia Cherifi, spécialiste en sociologie politique et enseignant à l’Université Alger II. Et comme, ajoute-t-il, «les responsables locaux ne déclaraient que les réalisations et omettaient les défaillances, il était difficile d’assurer le développement local escompté par le président de la République». Pour le sociologue politique, ce discours adopté par le chef de l’Etat et le Premier ministre révèle une volonté politique de réduire le fossé existant entre l’État et le citoyen. « C’est aussi une manière d’entériner l’idée selon laquelle l’État est au service du citoyen, et si on veut servir celui-ci, il faut aller sur le terrain», relève-t-il. Et de poursuivre : «L’important n’est pas dans la rhétorique ou dans les chiffres fictifs, alors que la réalité suggère des dysfonctionnements souvent inattendus.» Dans ce discours, il y a, selon lui, «un message en direction de la classe politique dirigeante, à tous les niveaux, selon lequel l’évaluation du travail d’un haut fonctionnaire se mesure à sa capacité à écouter puis à prendre en charge de manière concrète les préoccupations sur le terrain». Pour Cherifi, «les sorties fantaisistes suivies d’un long protocole n’ont pas de sens si elles n’assurent pas le développement local dans la commune ou dans la wilaya d’où les mises au point du président de la République qui ne cesse d’insister sur le fait que le citoyen est le maître dans son pays et l’Etat est à son service ». L’enseignanat tient, dans ce sens, à rappeler que «dans les réunions périodiques avec les walis pour s’enquérir de l’état d’avancement et de mise en œuvre des programmes de développement, le chef de l’Etat n’hésite pas à souligner d’un ton acerbe la nécessité de voir les responsables locaux veiller à lever toute injustice qui frappe le citoyen». D’ailleurs, affirme l’intervenant, «c’est dans cette perspective qu’intervient la nomination du médiateur de la République qui devait permettre au premier magistrat du pays d’être au fait de tous les problèmes du citoyen, y compris les plus simples». Selon Cherifi, «des responsables locaux qui ont la culture de l’État doivent pourtant trouver des solutions aux problèmes ou du moins les atténuer».
Résistance aux changements
Pour le député et politologue Ali Rebidji, «le travail de terrain manque terriblement à nos responsables bien qu’ils soient, souvent, interpelés par le président de la République qui rappelle à plusieurs reprises l’obligation d’exécuter le programme de développement». Selon lui, «la bureaucratie administrative et l’appréhension de l’acte de gestion pourraient être à l’origine de ce blocage qui entrave une mission visant à satisfaire les attentes des citoyens». Pour lui, «il existe toujours une résistance aux changements que beaucoup confondent avec les sorties populistes qui n’apportent rien de concret au développement local». Et de remarquer : «Le problème ne se situe pas au niveau des ministres puisque les obstacles sont souvent dressés par des responsables des administrations locales.» Selon Rebidji, «les sorties des ministres ou des walis sur le terrain sont insuffisantes en l’absence d’une communication efficace et d’une réelle coordination entre les premiers responsables du secteur et les directeurs de wilayas au niveau local». Et de conclure : «L’initiative administrative demeure très lente d’où le retard pris dans la concrétisation des recommandations prises lors de Conseils des ministres.»