L’entrepreneuriat culturel, un secteur en quête de projets

Associer l’art et l’innovation dans l’économie s’inscrit dans la nouvelle vision du ministère de la Culture qui compte encourager les jeunes porteurs de projets de se lancer dans l’entrepreneuriat culturel.

Comme premier pas, la ministre de la Culture et des Arts, Malika Bendouda et le ministre délégué auprès du Premier ministre chargé des Micro-entreprises, Nassim Diafat, ont signé, mercredi dernier, une convention de partenariat et de coopération pour la promotion des micro-entreprises dans le domaine culturel. Ce genre de projet doit d’abord susciter un intérêt particulier des jeunes puisqu’il l’entrepreneuriat culturel a ces spécificités. Sur le terrain, s’affirmer en tant qu’entrepreneur dans le domaine culturel pour les spécialistes en économie s’avère très difficile. Pour Abdelmalek Mebarek Serraï, expert international en économie, créer une start-up culturelle exige, dans un premier temps, la réhabilitation du secteur de la culture qui est en crise depuis des décennies.  «Quand je vois un orchestre avec quatre ou cinq musiciens alors que pour rechanter TaousAmrouche, par exemple, il faut un orchestre de 100 musiciens ou plus, dans les pays voisins, pour la musique andalouse, on voit plus de 150 musiciens, c’est pour cette raison que je suis pessimiste et sceptique», a-t-il dit.  Selon lui, rapprocher la culture de l’économie n’est pas toujours facile, ce qui fait que les entrepreneurs culturels, même s’ils existent, ils travaillent en isolement, voire peu ou mal accompagnés par les responsables du secteur économique. Et d’expliquer, s’agissant du côté financier.  «Il est vrai que c’est un levier de développement économie, compte tenu des atouts dont dispose l’Algérie de par sa diversité de son patrimoine matériel et immatériel, mais le manque d’intérêt de la part des responsables et les personnes cibles rend compliqué le lancement de projets économie spécialisés dans la culture et freinent considérablement les logiques de développement. «Au-delà d’une volonté réelle et sincère de soutenir la création d’entreprises dans le domaine culturel, il faut être pragmatique et réaliste en tenant compte de la réalité socio-économique du pays et la place de la culture du développement», a-t-il dit. L’expert a mis l’accent sur la nécessité de voir réunir toutes les conditions pour la réussite de cet investissement. Selon lui, il faut impérativement que le jeune soit d’un niveau culturel très élevé et il doit maîtriser le créneau dont il veut se lancer et réflexions assez élargies pour qu’il puisse gérer son entreprise. «Si ce jeune n’a pas les moyens culturels et techniques, son projet sera un échec tout en sachant, que sur le plan strictement financier, le secteur de la culture n’est vraiment pas rentable par rapport à d’autres activités économiques», a-t-il expliqué. Et d’ajouter : «L’entrepreneuriat culturel en Algérie n’est pas encore maîtrisé comme cela se fait dans d’autre pays». Il faut aussi rappeler que le prêt bancaire est très difficile à obtenir. «Les problèmes financiers sont un problème majeur pour les entrepreneurs du secteur», a-t-il dit. L’interlocuteur a rappelé, que pour l’instant, la gestion du secteur culturel est dominée par des entreprises publiques, ce qui a fait que le secteur n’est pas ouvert à l’investissement privé,  du moins pour les jeunes. «Je vois mal un jeune organiser une soirée théâtrale ou un grand événement culturel avec ses propres moyens, à part quelques petits projets qui peuvent être créés,  se lancer dans l’entrepreneuriat culturel s’avère une tâche difficile», a-t-il soutenu. Serraï a rappelé les atouts dont l’Algérie dispose. «Que peut-il faire un jeune avec des moyens peu développés et un manque d’expérience devant les institutions de l’Etat qui déjà, elles-mêmes, n’ont pas fait grand-chose pour le secteur de la culture qui traverse une crise depuis plusieurs années»,a-t-il ajouté. D’autres économistes que nous avons sollicités affirment n’avoir aucune analyse par rapport à cette thématique qui est une nouveauté pour l’Algérie. «Vous m’avez interrogé sur un sujet que je n’ai jamais abordé, donc je n’ai aucune donnée ni réflexion à vous faire», dira l’un d’entre eux.
Samira Belabed