Conférence sur la relance industrielle : A la recherche d’un modèle

 D’après les experts, avant de penser à changer nos méthodes de gouvernance et de politique industrielle, il faudrait d’abord mettre en place un nouveau modèle dans ce secteur, créateur de richesse, celui existant actuellement étant «inerte».

Le modèle industriel actuel, qui perdure depuis des décennies, est obsolète, voire inerte. C’est ce qui ressort du workshop consacré à la gouvernance, à l’occasion de la Conférence nationale sur la relance industrielle qui sera clôturée aujourd’hui au CIC, à Alger, par le Premier ministre, Aïmene Benabderrahmane. «Notre modèle industriel actuel est mort. Il ne produit pas de valeur ajoutée, de richesse, de croissance…C’est un modèle qui encourage l’importation et la consommation», indique l’expert dans l’économie industrielle Yacine Ould-Moussa. C’est à cause de ce modèle, explique-t-il, que nous sommes confrontés à une économie de marchand et non de marché. «Sans une logique de marché, on continuera à consommer nos ressources sans produire de croissance. En l’absence d’un modèle de croissance, comment pourrons-nous soumettre nos entreprises à une logique du marché?», se demande-t-il. Il a précisé, par ailleurs, que dans un écosystème aussi fermé que le nôtre, une autonomie économique est quasiment impossible. «Certes, des mécanismes de marché sont mis en place, mais comment appliquer ces derniers si l’on n’a pas de véritable marché? On est passé d’un développement industriel extensif à un développement intensif qui a tiré ce secteur vers le bas», signale-t-il.
Evoquant les entreprises publiques, il estime que ces dernières sont «répudiées» alors qu’elles sont un excellent vecteur de croissance. Ce dont ont besoin ces dernières, de même que les entreprises privées, c’est d’un modèle industriel clair dont les bases sont à définir. «Avons-nous besoin d’un modèle basé sur l’économie de la connaissance, des services ou bien des exportations?», souligne-t-il. A propos des expositions qui ont fait l’objet d’un autre workshop, le consultant en industrie Abdelkader Rahla a déploré que le nombre des exportateurs ne dépasse pas les 800 au niveau national.
Accompagner les entreprises dans la certification
«Ils seraient plus nombreux si nos exportateurs étaient réguliers. Beaucoup exportent une ou deux fois avant de laisser tomber», remarque-t-il, avant de faire part des défaillances dans ce domaine. La faiblesse de la compétitivité et en matière de capacités de la majorité des entreprises exportatrices et l’obsolescence de leurs outils de production. Leurs coûts de revient sont, en outre, trop élevés impactant ainsi les prix, tandis que leurs emballages sont au-dessous des normes. «Le cadre administratif et réglementaire n’est pas approprié et l’on note l’absence de bureaux d’Algex dans les pays ciblés par l’export ainsi que des bases logistiques dans les wilayas frontalières», rapporte-t-il. Ce qu’il nous faut dans ce domaine, selon lui, c’est d’actualiser la protection douanière de la production nationale et d’élargir la liste des produits interdis à l’import, à forte capacité locale. Il sera nécessaire aussi, poursuit-il, de renforcer les mécanismes de préférence nationale au profit des start-up, surtout celles qui n’ont pas accès au marché, et d’identifier les matières premières importées frappées d’une taxe douanière supérieure ou égale aux produits finis. «On a noté que 56% des importations sont destinées aux besoins des entreprises. Ce qui cause un déséquilibre entre leurs importations et leurs exportations», note-t-il.
Le représentant du ministère des Affaires étrangères, Rabah Fassih, recommande de dresser la liste des produits destinés à l’export, de créer une banque dédiée à la production nationale et d’encourager le métier de primo-exportateur. Il s’agira aussi, selon Rahla, d’élaborer avec les organismes des accréditations un plan d’accompagnement pour certifier nos produits. «Soutenir réellement nos entreprises pour améliorer leur compétitivité et faciliter leur accès aux marchés extérieurs. Il faut savoir que le programme de mise à niveau est un échec. Sur les plus de 5.000 dossiers introduits par les entreprises pour en bénéficier, près de 2.000 ne sont pas conformes et 200 seulement ont tiré profit de cette mise à niveau», constate-t-il.
Pour améliorer cette compétitivité justement, qui a fait également l’objet d’un atelier, les intervenants ont appelé à intégrer la recherche et le développement dans toutes les unités de production industrielles. Asseoir également un système national d’infrastructures de qualité, intensifier les formations sur les métiers de l’industrie et exploiter les brevets directement dans les entreprises. «Il est recommandé également d’industrialiser les prototypes innovants conçus par nos universités après un passage aux centre de recherche pour en améliorer la performance ainsi que la création d’un laboratoire de certification internationale, inexistant en Algérie», conclut-il.
Farida Belkhiri