Le HCA édite un livre de Farid Benramdane : Généalogie d’une nation

Farid Benramdane, expert reconnu dans le domaine et chercheur associé au CRASC d’Oran et dont le  HCA vient de publier son dernier livre : « Nation et nomination : l’Algérie à travers l’histoire de ses noms propres ».

Le présent ouvrage, dit-il, «se veut un essai de restitution de manière synthétique d’un système de dénomination algérienne dans un pays aussi vaste que l’Algérie». «C’est dire en même temps, l’ampleur de la tâche et le risque d’une telle entreprise scientifique», fait-il remarquer, car «ce patrimoine immatériel dans ses expressions linguistiques les plus diverses et ses catégories de nomination les plus usitées investit des domaines d’investigation aussi divers que les toponymes, noms de tribus, noms de personnes, noms de relief, noms des espaces religieux et mystiques».

L’onomastique, la science qui étudie les noms propres des lieux, des personnes, des tribus etc., permet d’établir en quelque sorte la généalogie de la nation, de sa mémoire collective pour renforcer sa cohésion, car derrière un nom se cachent non seulement des choix intimes, des préférences, des ancrages historiques, mais aussi des stratégies de groupes et d’États. N’a-t-on pas vu le pouvoir colonial entreprendre d’effacer la mémoire en renommant nos villes et en mettant en place, en 1882, un système d’état civil qui s’avérera un outil de contrôle et de répression des populations ?

L’auteur n’hésite pas à parler à ce propos de« désalgérianisation» et de dérèglement identitaire. Une vraie rupture et violence symbolique dont Benramdane rappelle les objectifs et les effets qui perdurent. Toute sa démarche dans cet essai académique reparti en dix chapitres et qui fourmille de références, se veut une quête des invariants culturels et anthropologiques qui, écrit-il dans les premières pages et en conclusion, fondent une algérianité dans «la pleine diversité de ses parcours socioculturels».

Il s’intéresse à de nombreux patronymes dont certains alimentent l’actualité pour voir comment se forment, sur les plans morphologique et sémantique, les noms et à quelle logique obéissent les transformations qu’ils subissent au gré des contacts notamment entre langues et peuples. Il montre aussi comment l’onomastique algérienne a connu diverses influences même si son substrat fondamental est arabo-amazigh.

En s’appuyant sur une riche bibliographie et des recherches de terrain croisées, Benramdane a recours à l’histoire et à la psychologie pour démêler les fils de la filiation traditionnelle et expliquer les significations  de la toponymie et de l’anthroponymie et les processus de formation des noms. Il récuse également  les procès que certains intentent à des familles à qui sont attribuées des origines fausses et qui sont livrées selon lui «à des tsunamis médiatiques inacceptables». Il aborde enfin le problème de l’écriture des noms de nos villes qui s’est posé lors de la création de nouvelles wilayas dans le Sud et dans la transcription dans les APC. «La variation dans l’écriture d’un même nom a atteint des niveaux insoupçonnés», relève-t-il.

Benramdane est parti à la quête, «d’une algérianité qui se nomme et se dévoile par les noms de ses familles, de ses oueds et grottes». C ‘est que connaître les noms de tribus, de familles est une autre façon d’appréhender l’histoire d’une société qui ne se limite pas aux batailles, aux dates d’évènements». Avec un souci du détail, l’universitaire s’efforce de montrer que l’Algérie est une vieille nation dont l’ADN transparaît dans les dénominations de ses hommes et de ses paysages.

Samira Belabed

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