Réunion des dirigeants de l’Algérie, de la Tunisie et de la Libye : Des experts insistent sur la convergence de vues

L’ALGÉRIE, LA TUNISIE ET LA LIBYE, nations liées par l’histoire, la culture et la géographie, se trouvent aujourd’hui à un carrefour crucial. La région du Maghreb, riche en potentialités, est confrontée à de multiples défis.

Face à ces enjeux communs, il est impératif que ces trois pays unissent leurs forces et renforcent leur coopération pour bâtir un avenir meilleur pour leurs peuples. La rencontre de lundi dernier à Tunis entre les trois pays ouvre la perspective d’autres adhésions.  En se basant sur des intérêts communs et une vision partagée pour la région, ces pays pourraient donner vie à ce nouveau bloc économique, à l’instar des autres communautés économiques régionales en Afrique. Le communiqué issu de la réunion de Tunis entre les dirigeants de l’Algérie, de la Tunisie et de la Libye met en lumière cette vision commune avec des engagements concrets pour renforcer la coopération régionale.

Les dirigeants ont, d’ailleurs, réaffirmé l’importance de l’unification des positions et de l’intensification de la concertation pour promouvoir la sécurité, la stabilité et le développement dans la région, face aux mutations régionales et aux crises internationales successives. Cette réunion est un pas important vers une coopération régionale plus étroite et des actions concrètes pour faire face aux défis communs auxquels sont confrontés ces pays. Selon le professeur Habib Barik Allah du centre universitaire de Tindouf et récipiendaire du Prix distingué de la jeunesse arabe, «la rencontre tenue en Tunisie a été fructueuse et s’inscrit dans le cadre de l’activation de l’unité maghrébine et de la recherche davantage de solutions, en particulier en ce qui concerne la sécurité des frontières, qui fait l’objet de nombreuses tentatives malveillantes de la part de certaines parties cherchant à semer la discorde entre ces pays».

Sécurité et développement économique

Pour lui, «l’un des résultats les plus importants de cette réunion est sans doute le travail de renforcement de la coordination sécuritaire aux frontières, de lutte contre l’immigration clandestine et de la promotion des relations économiques et commerciales». En effet, cette coordination renforcée, comme le souligne le professeur Barik Allah, peut se concrétiser par des avancées tangibles sur le terrain. Notamment, une meilleure coopération entre les forces de sécurité des trois pays qui peut contribuer à réduire la criminalité transfrontalière, le trafic de drogue et la contrebande. Face à la menace terroriste transfrontalière, une réponse collective et coordonnée est ainsi indispensable pour instaurer un environnement plus sûr pour les populations des zones frontalières.

Selon l’auteur de l’étude socioéconomique et socioculturelle sur Tindouf aux XIXe et XXe siècles, la coopération en matière de sécurité est d’une importance capitale. «Elle doit se concrétiser par une coordination conjointe pour protéger les frontières communes contre  l’immigration illégale, la criminalité transfrontalière, notamment en provenance des pays du sud du Sahara, et d’autres formes de criminalité organisée».

Cette volonté politique, affirme-t-il, «est réelle et partagée par les trois pays du Maghreb. Ils aspirent à s’unir pour faire face aux menaces et œuvrer pour l’intérêt général dans les domaines politique, diplomatique, économique et social». Fort de cette volonté commune et face aux défis sécuritaires croissants, l’auteur souligne l’urgence d’une coopération renforcée en matière de développement économique. D’autant plus, ajoute Barik Allah, que «la région est confrontée à des tensions sécuritaires orchestrées par certains pays voisins qui cherchent à saper la stabilité et à semer la discorde».

L’union des forces est indispensable pour le développement économique, sachant que les trois pays regorgent d’importantes ressources naturelles et humaines. Ils peuvent créer un marché régional dynamique et attirer les investissements étrangers, en harmonisant leurs politiques économiques et en mettant en place des projets d’infrastructures communs. Conscients des enjeux et des défis à relever, les participants à la rencontre de Tunis ont également souligné l’importance de préserver l’élan de cette initiative prometteuse. Et afin d’éviter que celle-ci ne tombe dans l’inertie, Barik Allah préconise de «donner suite en urgence à la déclaration conjointe issue de cette réunion, laquelle contient des points positifs favorisant le dialogue consultatif».

Il insiste sur «la nécessité de ne pas succomber aux manœuvres malveillantes, notamment celles provenant du Makhzen, qui cherchent à déstabiliser l’unité maghrébine par le biais d’une campagne médiatique menée par l’entité sioniste et certains pays voisins par procuration». Il tient, enfin, à rappeler, «le rôle prépondérant de la diplomatie algérienne». «L’Algérie demeure un symbole essentiel de défense du droit des peuples à l’autodétermination, notamment en ce qui concerne la question du Sahara occidental et la cause palestinienne», a-t-il indiqué.

Une réponse nécessaire face aux enjeux géopolitiques

L’enseignant en relations internationales à l’Ecole nationale supérieure des sciences politiques, Hossam Hamza, revient, pour sa part, sur la nécessité d’une coopération maghrébine face aux bouleversements géopolitiques. «Le contexte international actuel, marqué par des transformations profondes et des confrontations croissantes entre les puissances, annonce l’émergence de nouveaux équilibres mondiaux. Ces équilibres seront favorables aux blocs d’États qui défendent leurs intérêts communs», a-t-il expliqué, estimant que «la convergence des volontés politiques et la formation d’un bloc maghrébin constituent une réponse nécessaire aux défis actuels».

Dans son analyse, le docteur Hossam souligne que «les dynamiques en cours au Maghreb doivent s’inscrire dans la continuité des initiatives lancées par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, notamment lors du Sommet arabe d’Alger en 2022, qui a réaffirmé l’importance de l’intégration pour les pays arabes qui doivent renforcer leur coordination». Outre cette convergence de vues, le politologue estime qu’«un ensemble de défis sécuritaires et économiques communs exige une action concertée de la part des pays du Maghreb». Et d’ajouter : «La déclaration finale de la réunion consultative de Tunis met en évidence cette volonté de coopération en soulignant l’importance de construire des visions communes sur les grands dossiers régionaux, tels que la question libyenne, les menaces sécuritaires et la situation au Sahel».

Cela démontre, selon lui, la détermination des pays maghrébins à unifier leurs perceptions et à élaborer des stratégies communes pour faire face à ces enjeux. Un consensus qui laisse entrevoir une volonté d’harmoniser leurs perspectives et de développer des stratégies concertées pour répondre à ces défis. Par ailleurs, le politologue insiste sur «l’importance d’avoir une position cohérente face aux acteurs extérieurs, qu’ils soient partenaires, concurrents géopolitiques ou adversaires». Cela implique, selon lui, que «les trois pays définissent rapidement des positions communes sur les menaces, les intérêts communs, la sécurité et les approches de développement».

Ce message constitue, pour Dr Hossam, «l’un des piliers fondamentaux que l’Algérie a souhaité véhiculer à l’échelle internationale, ou du moins établir lors de cette rencontre consultative, en vue de son renforcement lors des prochaines rencontres».

Assia Boucetta

Bouton retour en haut de la page