Production laitière : Le mégaprojet algéro-qatari prend forme

Une étape majeure a été franchie, mercredi, dans le renforcement de la sécurité alimentaire de l’Algérie avec la signature d’un accord-cadre entre le ministère de l’Agriculture et du développement rural et la société qatarie Baladna.

Ce projet titanesque, d’une valeur de 3,5 milliards de dollars, permettra de produire localement 50% des besoins nationaux en lait en poudre, tout en approvisionnant le marché local en viande rouge, en contribuant à l’augmentation du cheptel bovin national et en créant 5 000 emplois directs. La cérémonie de signature s’est déroulée à Alger en présence du ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Youcef Cherfa, du ministre des Finances, Laâziz Faid, du ministre de l’Energie et des Mines, Mohamed Arkab, du ministre du Commerce et de la Promotion des exportations, Tayeb Zitouni, du ministre de l’Hydraulique, Taha Derbal, et du ministre de l’Industrie et de la Production pharmaceutique, Ali Aoun. Etaient présents également à la cérémonie de signature, le Conseiller auprès du président de la République chargé des finances, des banques, du budget, des réserves de change, des marchés publics et des règlements internationaux, Mohamed Boukhari, le wali d’Adrar, Larbi Bahloul, et des responsables de plusieurs institutions et organisations, ainsi que l’ambassadeur du Qatar en Algérie, Abdelaziz Ali Al-Naama. L’accord a été paraphé par Souad Assous, directrice générale de l’Investissement agricole et du Foncier au ministère de l’Agriculture et du Développement rural, et Mohamad Moutaz Al-Khayyat, président du conseil d’administration directeur général de la société Baladna.

Dans son discours prononcé à cette occasion, Youcef Cherfa a souligné l’intérêt vif exprimé par la partie qatarie pour la stratégie de développement que l’Algérie envisage de mettre en œuvre à moyen et long terme afin de diversifier son économie et renforcer sa sécurité alimentaire. Il a déclaré : « ceci se réalisera par l’augmentation de la production, la création de richesse, l’amélioration des conditions de vie de la population, la création d’emplois, la préservation des ressources naturelles et leur exploitation durable, ainsi que la création d’un climat favorable à l’investissement national et étranger ». Le ministre a ajouté que « le secteur agricole occupe la deuxième place en Algérie en termes de contribution au produit intérieur brut, après le secteur des hydrocarbures, ce qui a incité les autorités à se concentrer sur son développement ». Selon lui, « pour garantir la production des besoins alimentaires de base dans le cadre d’une vision économique globale et intégrée, l’approche adoptée repose sur la promotion de l’investissement agricole structuré, la modernisation des systèmes de production et la création de pôles agricoles intégrés dans les wilayas du sud ». Le ministre a ensuite présenté le projet de partenariat avec « Baladna » comme un exemple concret de la politique d’investissement adoptée par l’Algérie dans le domaine agricole.

« Ce projet a bénéficié de diverses incitations telles que des avantages fonciers, un accompagnement financier, ainsi que des incitations prévues par la loi 18-22 relative à l’investissement de 2022 », a-t-il précisé. Il a mentionné que « des facilités supplémentaires ont été mises en place récemment pour les grands opérateurs désireux d’investir dans l’agriculture dans les régions du sud, sous la forme d’un « couloir vert » dédié aux grands projets ». Le projet « Baladna » de production de lait en poudre s’inscrit dans cette stratégie et permettra de couvrir 50 % des besoins nationaux en lait en poudre, en plus de son rôle dans l’approvisionnement du marché local en viande rouge et de la création d’emplois directs ».

« Ce projet structurant, réalisé en partenariat entre Baladna (51 %) et le Fonds national d’investissement (49 %), s’étendra sur une superficie totale de 117 000 hectares dans le sud du pays, notamment, à Adrar », a-t-il encore précisé, soulignant que « chaque pôle comprendra une ferme de production de céréales et de fourrages, une ferme d’élevage de bovins et de production de lait et de viande, ainsi qu’une usine de production de lait en poudre ». « Les premières phases de production débuteront à l’horizon 2026, avec le lancement du projet prévu pour le mois d’octobre prochain », a-t-il indiqué. Le ministre des Finances a salué, pour sa part, la profondeur des relations distinguées qui lient l’Algérie et le Qatar, illustrée par le lancement de ce nouveau projet d’investissement.

Un investissement de 3,5 milliards de dollars

Cet investissement, souligne Laaziz Faid, qui « vise à développer l’agriculture céréalière, la production de lait en poudre et de viande, s’inscrit dans le cadre du renforcement du partenariat entre les deux pays et concrétise la volonté de leurs dirigeants de développer les investissements conjoints ». Faid a rappelé, dans ce sens,  le succès du partenariat algérien dans l’entreprise sidérurgique Algerian Qatari Steel (AQS), qui produit aujourd’hui, selon lui,  « plus de deux millions de tonnes de fer et connaîtra un développement remarquable dans les années à venir ». Il a ajouté que « le partenariat avec le secteur privé qatari, via les sociétés holding d’investissement, a conduit à la construction d’un hôpital à Sidi Abdellah ».

« À présent, on s’apprête à franchir une étape supérieure en lançant un nouvel investissement de plus de 3,5 milliards de dollars, un projet intégré dans l’agriculture céréalière, la production de lait en poudre et de viande », a-t-il indiqué. Faid a souligné, également, l’importance que lui et son département accordent à ce projet et à ce partenariat, « œuvrant pour l’implication de l’Algérie à travers le capital du Fonds national d’investissement dans les deux projets ».

Le ministre a en outre mis en lumière « l’importance stratégique du projet, notamment en termes de développement de l’investissement dans la production laitière à un niveau sans précédent, ainsi que pour la création d’emplois et l’amélioration de la sécurité alimentaire dans les régions du sud où le projet sera implanté ». Il a affirmé que « le projet contribuera à réduire considérablement les importations de lait, à générer des emplois dans les régions reculées, à acquérir des technologies modernes dans le domaine agricole et de la gestion de projets, et à renforcer l’économie nationale tout en améliorant la sécurité alimentaire face aux défis mondiaux tels que les changements climatiques, la croissance démographique et les tensions géopolitiques ». Le ministre des Finances dit espérer voir « ce partenariat, concrétisé par la société mixte créée pour ce projet, élargir ses activités vers les marchés africains, renforçant ainsi l’économie nationale et le partenariat entre les deux pays ». Faid a également exprimé l’intention de son département de développer de nouveaux projets de partenariat avec les Qataris, en harmonie avec les objectifs politiques et économiques des deux pays. L’Ambassadeur du Qatar en Algérie a salué, de son côté, la pose de cette nouvelle pierre dans l’édifice de la coopération entre Doha et Alger. Abdelaziz Ali Al-Nama a exprimé son enthousiasme, déclarant que cet accord marque non seulement une avancée dans la coopération entre les deux pays, mais également le début d’une nouvelle ère de partenariat stratégique.

« C’est avec un immense plaisir que je participe aujourd’hui à cette cérémonie pour marquer la pose d’un nouveau jalon dans la coopération exemplaire et fructueuse entre le Qatar et l’Algérie, pays frère. », a-t-il indiqué. Al-Naama a souligné que « la signature de cet accord constitue une étape importante dans le renforcement des relations bilatérales entre les deux pays ». Il a également mis en avant « le rôle crucial joué par les dirigeants du Qatar et de l’Algérie dans l’initiation et le développement de cette coopération fructueuse ». Il a ainsi salué « l’engagement sans faille de Son Altesse Cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, Emir de l’État du Qatar, et de Son Excellence le Président Abdelmadjid Tebboune, dans la promotion de ces relations ». Pour l’ambassadeur, « ce projet symbolise le succès d’un nouveau pan de coopération initié au cours des dernières années ». Il a, dans ce sens, rappelé les succès précédents des investissements qataris en Algérie, tels que l’entreprise sidérurgique Algerian Qatari Steel (AQS) de Bellara, la société Ooredoo pour les télécommunications et l’hôpital algéro-qatari en cours de construction. Al-Naama a, enfin, exprimé sa conviction que « ce n’est là que le début d’une série de succès à venir pour les deux pays dans divers domaines ». Il a, également, réaffirmé l’engagement du Qatar à renforcer ses relations avec l’Algérie et à établir un partenariat stratégique et profond.

194 000 tonnes de lait en poudre dès la première phase

Face aux défis de sécurité alimentaire en Algérie, émerge un projet d’envergure. Couvrant une superficie totale de 117 000 hectares, cette initiative novatrice se structure autour de trois pôles intégrés. Chacun de ces pôles abrite une ferme de production de céréales et de fourrage, une exploitation d’élevage de vaches laitières pour la production de lait et de viande, ainsi qu’une unité de fabrication de lait en poudre. Outre son impact sur la sécurité alimentaire, le projet Baladna générera d’importantes retombées économiques pour l’Algérie. « L’adoption de technologies de pointe et des meilleures pratiques d’élevage permettra d’optimiser la production et de garantir la qualité du lait et de ses dérivés », assure le président du conseil d’administration de la société Baladna.

« Les grandes fermes d’élevage intégrées contribueront également à la réduction des coûts de production grâce aux économies d’échelle et à la maîtrise de l’ensemble de la chaîne de valeur », a ajouté Mohamed Moataz Al-Khayyat, qui assure que ce « projet rassemble la détermination de l’Algérie et l’expertise de la société Baladna dans ce domaine ». Il s’agit, explique-t-il, « de la construction d’un système local intégré pour l’industrie laitière, capable de produire environ 194 000 tonnes de lait en poudre par an ». Dans la première phase du projet, fait-il savoir, « des fermes seront aménagées pour répondre aux besoins en fourrage. Dans la deuxième phase, la société construira une ferme pouvant accueillir jusqu’à 50 000 vaches, ainsi que des installations de haute performance, des lignes de production et des technologies de pointe pour la production de lait en poudre ». Selon lui, « la société investira ensuite dans le développement du système en construisant des complexes répartis à travers tout le pays, chacun comprenant des terres pour la production de fourrage, une ferme d’élevage de bovins et une usine ultramoderne de production de lait en poudre». « Au terme de la neuvième année de ce projet, le nombre total de bovins atteindra 270 000 têtes, produisant environ un milliard et 700 millions de litres de lait par an », a-t-il précisé.

Assia Boucetta

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